Nous ne savons que très peu de choses sur l’arc chez les Gaulois, tant en ce qui concerne son utilisation que sa morphologie, sa puissance ou son efficacité. Les arcs miraculeusement retrouvés pour les périodes antérieures et postérieures peuvent cependant nous renseigner sur son évolution dans l’Antiquité. Partant des faibles sources dont nous disposons pour la période de La Tène et de ce recoupement, nous pouvons deviner à quoi ressemblaient ces arcs. Il s’agirait d’arcs simples, réalisés en une seule pièce de bois, taillée généralement dans un tronc. Les formes quant à elles, restent souvent les mêmes, puisque l’on doit respecter les limites mécaniques du bois.Pour ce qui est des essences utilisées, on retiendra l’orme, l’if, l’érable ou le frêne, bien que n’importe quel bois pourrait théoriquement convenir. Un arc en noisetier pouvant, par exemple, servir pour un enfant ou pour chasser de petits oiseaux.
On sélectionne l’arbre sur pied, qui est alors abattu, coupé en section d’environ deux mètres de longueur, écorcé et débité en quartiers à l’aide de coins. Vient alors une longue attente qui peut durer jusqu’à deux ans, où l’on laisse le bois sécher lentement, avant de pouvoir réellement s’adonner à la fabrication de l’arc à proprement parler. Il s’agit alors d’ôter de la matière en respectant les fibres du bois (quoique certains arcs découverts dans les tourbières ont été fabriqués en ne respectant pas les cernes, ce qui ne devait pas les empêcher de fonctionner…), afin que l’arc plie de façon régulière et symétrique.
On utilisera hache, herminettes, plane, ciseaux, râpes, limes ou même des couteaux. Ces outils sont couramment retrouvés en fouille sur les sites archéologiques de la période laténienne. L’établi cependant ne nous est pas parvenu, vraisemblablement façonné en matériaux périssables. On peut se baser sur le banc de sabotier, attesté pour la période gallo-romaine, et concevoir un établi avec une pédale bloquant la pièce à travailler via un système de cordes, comme l’établi Froissart.
L’utilisation de l’arc chez les gaulois est, au départ, principalement civil. Pour les gens du peuple, il s’agissait peut-être de la chasse de petits animaux, et pour l’aristocratie, d’une chasse de grands gibiers, de façon rituelle et très occasionnelle. A la guerre, les guerriers gaulois n’ont pas un grand intérêt pour l’arc, préférant le combat au corps à corps ou, dans le cas des armes de tir, la fronde ou le javelot. Ils sont cependant forcés de s’en servir, notamment lors de la guerre des Gaules, lors de sièges, ou tout simplement parce que chaque homme du peuple partant à la guerre ne dispose pas forcément du matériel ou de l’entraînement des guerriers accomplis.
La fabrication de flèches
La fabrication d’une flèche prend un temps considérable si l’on considère que c’est un objet à usage quasiment unique.Le fût de la flèche peut-être fabriqué de deux façons. On peut couper des pousses d’arbres qui sont assez droites et qui ont à peu près le calibre requis. Le noisetier par exemple, est excellent pour cela. On écorce les fûts, on les fagotte ensemble pour qu’ils sèchent en restant le plus droits possible (on peut aussi les redresser à la flamme), et il ne reste plus qu’à les couper à la bonne longueur. Cependant, ce type de bois est assez peu dense, n’offrant pas une qualité balistique optimale. Le projectile sera relativement léger et volumineux, ce qui le rendra plus lent, avec une trajectoire plus aléatoire. On peut ainsi faire des fûts taillés dans la masse de troncs d’arbres. Le travail est bien plus long, mais le fût sera plus dense, et la flèche de meilleure qualité.
L’encoche est taillée directement dans le fût, avec une ligature pour la renforcer et éviter qu’elle n’éclate lorsque la corde de l’arc y mettra toute sa pression.
L’empennage à l’arrière va servir à stabiliser le vol de la flèche, à freiner l’arrière du fût pour garder la pointe à l’avant, et aussi à rendre le tir plus précis. On utilise des plumes. N’importe quel oiseau fera l’affaire, mais les rapaces offrent des plumes de meilleure qualité. Ces plumes sont collées et ligaturées à l’arrière du fût.
Reste encore la pointe, faite à la forge, puisque les pointes de flèches laténiennes sont en métaux ferreux. Elle peut avoir une pointe de forme variée: feuille de saule, simple ou double barbelure, ou encore une simple pointe de section carrée de type perce-maille. Pour la fixation, elle se fait au moyen d’une soie qui vient se ficher dans le fût qui sera alors ligaturé, ou plus souvent au moyen d’une douille dans laquelle se logera le fût. La pointe peut être collée, ou simplement fixée avec un peu de cire.
Aucune source ne semble attester l’utilisation d’un quelconque poison sur ces flèches, ou encore d’un corps gras sur la pointe pour en faciliter la pénétration. L’usage de l’arc et de ses flèches à la guerre reste plus onéreux que l’usage de la fronde. Cependant, l’archer pouvait être utilisé comme une sorte d’artillerie à plus de 120 mètres de distance, ou à courte portée, mêlé aux autres types de troupes.
Par Régis Harter pour les Trimatrici©