L’armure de mailles, ou cotte de maille, est une invention celte datant de la fin du IVe avant notre ère.
C’est une chemise composée de milliers d’anneaux de fil de fer assemblés, pour un poids oscillant entre 8 et 13kg . Des épaulières peuvent venir renforcer la protection au niveau des épaules, ou sont présentes pour tout simplement fixer l’armure. Le fer n’étant pas aussi facile et rapide à produire qu’aujourd’hui et la confection et l’assemblage des mailles étant long et minutieux, ce type d’armure est réservé à l’élite de la société gauloise, les aristocrates et leur garde personnelle, seuls à même de pouvoir s’offrir ou se faire offrir un tel objet.
Il fallait plusieurs mois à des artisans qualifiés pour fabriquer une telle armure. Le fer acheté en lingot et fabriqué par des artisans spécialisés est tout d’abord étiré jusqu’à l’obtention d’un fil d’environ 1mm à 1,5mm (et parfois même moins !). Cette opération est déjà extrêmement longue, puisqu’il faudra plus d’un kilomètre de fil de fer. Il est ensuite enroulé autour d’une tige de bois ou de métal afin de constituer une spirale. Cette spirale est ensuite coupée dans sa longueur pour obtenir les anneaux, d’un diamètre moyen de 7 à 8mm (13mm de diamètre externe pour les plus grands (Tiefenau, Suisse), 4,5mm pour les plus petits (Vernon, France)). Ces dimensions peuvent varier légèrement sur une même cotte, et dans de certains cas il peut même y avoir de grandes différences (ce qui peut éventuellement être dû au contexte archéologique ou à des réparations). Ces anneaux sont enfin assemblés les uns aux autres, en aboutant ou rivetant les extrémités de chaque anneau. Certaines cottes de mailles ont même des anneaux soudés : ces découvertes illustrent tout à fait l’extrême compétence des forgerons celtes, et le temps colossal nécessaire à la fabrication de cette armure. Chaque anneau est relié à 4 anneaux, bien qu’il existe un exemple où chaque anneau est relié à 6 autres anneaux (Tiefenau, Suisse).
Pour exemple du temps de travail, différentes publications nous renseignent sur le montage de cottes de mailles celtes, sans compter le temps de fabrication du fil : 200 heures pour une cotte aboutée (JUNKELMANN 1986), 4813 heures pour une cotte alternant anneau riveté et anneau abouté, 9852 heures pour une cotte entièrement rivetée (D. SIM, 1997).
Il existe des exemples d’armures de mailles composés partiellement ou intégralement d’anneaux en alliage cuivreux (« laiton ou bronze »), comme à Pontoux en France ou à Titelberg au Luxembourg. En plus d’une résistance inférieure, les alliages cuivreux sont plus lourds que le fer à volume égal, et donc moins appropriés pour la confection d’armes et de pièces d’armures.
L’armure de mailles protège le guerrier des coups de taille et d’entaille. En fonction de sa force, un coup d’estoc peut tout de même traverser l’armure, d’autant plus avec des anneaux aboutés qui s’ouvriront à l’impact. En revanche, lorsque les anneaux sont rivetés, il faut que le coup soit encore plus fort afin de trancher la section du fil ou de faire sauter le rivet. Quoiqu’il en soit, l’aspect contondant du coup de taille ou d’estoc est peu amorti par l’armure. Un vêtement rembourré est donc vital sous la cotte, sous peine de voir ses os fracturés ou les anneaux de celle-ci s’imprimer dans la peau du combattant. Du fait du caractère périssable du cuir ou du tissus, nous ne savons pas si les gaulois portaient une sous-armure en cuir ou en tissu pour amortir le coup et éviter que les armes perforantes ne viennent blesser le combattant trop facilement. A notre connaissance, le seul exemple présentant potentiellement un tel vêtement réside sur la statue du guerrier de Vachère (gallo-romain) où un pan qui semble épais et relativement rigide dépasse de sous l’ armure. Fendue au niveau de l’entre-jambe, cette sous-armure ne gêne pas les mouvements du guerrier et reste adaptée pour un cavalier. En revanche, l’utilisation d’une sous-armure en contexte romain (appelée subarmalis) ou médiéval est attesté (appelé gambison).
L’armure de mailles inventée par les Gaulois protège particulièrement bien son porteur. Très coûteuse, elle est généralement réservée à l’élite : un aristocrate ou son ambacte. Souple, elle n’entrave pas du tout la mobilité du guerrier mais nécessite de ce fait le port d’une sous-armure pour amortir les chocs. Son utilisation a perduré durant tout le Moyen-Âge, la Première Guerre Mondiale, ou même les plongeurs avec des requins ou certains gants de bouchers aujourd’hui.
Par Daniel Roquet pour les Trimatrici©